Apparue au début du XXe siècle, l’éducation spéciale pour les enfants handicapés s’inscrivait dans un mouvement idéologique qui visait à « protéger la société de tous les malades et anormaux » et qui s’est durci sous Vichy rappelle, dans une tribune au « Monde », l’inspectrice générale de l’éducation Martine Caraglio.
Tous les enfants ont le droit d’être scolarisés. Pourtant ce droit a longtemps été dénié aux élèves handicapés. Dans notre pays qui a promu, dès la fin du XIXe siècle, l’instruction primaire obligatoire pour les enfants des deux sexes, il a fallu attendre le début du XXIe pour accorder ce droit fondamental aux personnes handicapées. De fait, trois périodes caractérisent la scolarisation des élèves handicapés : une longue période ségrégative, une période intégrative et une récente période inclusive.
Souffrons que, pour en terminer avec le processus de marginalisation qui caractérise l’histoire de ces élèves hors norme et surmonter les obstacles qui entravent encore une scolarisation de droit commun, l’école inclusive devienne une obsession ! Si l’avènement des premières institutions pour les jeunes sourds et aveugles voit le jour dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, ce n’est qu’au début du XXe siècle qu’apparaît l’éducation spéciale.
Certes, cette émergence répond pour partie à un souci humaniste qui ambitionne de prendre en charge ceux qui étaient jusqu’alors « hors humanité ». Mais elle s’inscrit surtout dans un mouvement général d’hygiène sociale et d’idéologie naturaliste qui vise à protéger la société de tous les malades et anormaux. A la fin du XIXe siècle, la science veut classer et organiser, elle se met donc à recueillir et à ordonner les comportements humains : l’anormal, le fou, le pervers, l’infirme, le malade, le dégénéré, l’arriéré…